

Vaccins contre le Covid: la justice européenne tranche sur les SMS de von der Leyen
La justice de l'UE doit dire mercredi si la Commission européenne avait le droit de refuser l'accès au contenu des SMS échangés en pleine pandémie du Covid entre sa présidente Ursula von der Leyen et Albert Bourla, PDG de Pfizer.
Dans cette affaire le manque de transparence de l'exécutif européen a été épinglé, notamment par la médiatrice de l'UE.
Ces textos, dont le contenu est toujours resté secret, ont été échangés au moment où le laboratoire Pfizer/BioNTech était le plus gros fournisseur de vaccins anti-Covid à l'Union européenne. Les contrats négociés par la Commission au nom des Vingt-Sept se chiffraient en milliards d'euros.
Cela a valu à Mme von der Leyen d'être la cible de plusieurs plaintes, dont l'une au pénal en Belgique pour "destruction de documents publics" et "corruption", à laquelle étaient associées la Pologne et la Hongrie. Cette plainte a été déclarée irrecevable en janvier par la cour d'appel de Liège.
Le volet qui doit être tranché mercredi matin par le Tribunal de l'UE à Luxembourg concerne la plainte d'une journaliste du New York Times, Matina Stevis, qui avait révélé en avril 2021 l'existence de ces échanges numériques.
La journaliste a souhaité l'année suivante se voir communiquer tous les SMS échangés entre Mme von der Leyen et M. Bourla entre le 1er janvier 2021 et le 11 mai 2022, au titre de la possibilité légale d'accéder à des documents publics de l'UE, en vertu d'un règlement européen de 2001.
Le refus opposé par la Commission l'a poussée à saisir la justice européenne, avec le soutien de son journal.
"La Commission a rejeté la demande au motif qu'elle ne détenait pas les documents visés par celle-ci. Mme Stevis et The New York Times ont demandé au Tribunal de l'Union européenne d'annuler la décision de la Commission", rappelle le tribunal.
Pour justifier son refus, l'exécutif européen a affirmé être incapable de produire ces textos.
Ils n'ont pas été enregistrés et archivés en tant que documents publics, "faute de contenu substantiel", a expliqué un de ses responsables lundi devant la presse. "Les SMS ne sont pas systématiquement considérés comme des documents publics".
- "Problématique" -
Le 15 novembre 2024, l'audience de plaidoiries avait donné lieu à des échanges animés entre les deux parties à Luxembourg
Bondine Kloostra, avocate du New York Times, avait accusé la Commission d'avoir "violé les principes de bonne administration et de communication" en négligeant l'importance de ces SMS.
En face, Paolo Stancanelli, juriste chargé de défendre la Commission, avait plaidé que les textos échangés n'entraient en aucun cas dans le cadre d'une négociation sur les conditions d'achat des vaccins. En outre, les services de la Commission, sollicités pour retrouver ces échanges en 2022, s'étaient adressés au cabinet de Mme von der Leyen, qui s'était dit "incapable" de les retrouver.
"La Commission européenne n'a jamais nié qu'il y avait eu des interactions entre Ursula von der Leyen et Albert Bourla. Il manque le lien entre ces textos et la discussion sur les accords portant sur les vaccins", a insisté M. Stancanelli.
L'affaire a suscité une controverse au sein même des institutions bruxelloises.
La médiatrice de l'UE, à l'époque l'Irlandaise Emily O'Reilly, avait demandé début 2022 au cabinet de Mme von der Leyen de s'efforcer de mettre la main sur les SMS.
"Il est clair (qu'ils) entrent dans le cadre de la législation européenne sur l'accès du public aux documents" et "le public peut y avoir accès s'ils concernent le travail de l'institution", avait-elle estimé, parlant d'un dossier "problématique".
En janvier 2022, par la voix d'un porte-parole, la Commission avait indiqué envisager une mise à jour de sa politique d'accès aux documents, sans plus de précisions.
Durant la période Covid, l'UE a acheté ou réservé plus de la majorité des doses de vaccin au duo américano-allemand Pfizer/BioNTech, même si cinq autres fabricants ont vu leurs vaccins homologués par le régulateur européen.
F.Galea--JdM